Pour changer, je vais vous raconter non pas la vie d’un officier polonais, ni la description de l’uniforme d’un soldat, et encore moins l’histoire d’un régiment, mais celle d’une polonaise que vous connaissez tous, je veux parler de celle qui fût « l’ange polonais » où encore que l’on surnomma « son épouse polonaise » : la belle et jeune patriote exaltée… Marie Walewska.
Voici l’HISTOIRE de la belle Polonaise à partir de janvier 1807
Après avoir vaincu les Prussiens, la grande armée fait route sur Varsovie. Napoléon arrête sa berline le 1er janvier 1807 au relais de poste que l’on pense être celui de la ville de Blonie, sous les acclamations de la foule venue voir celui qui porte les espoirs des partisans de l’indépendance de la Pologne. A peine la berline est-elle à l’arrêt qu’il en descend et, devant cette foule immense, une jeune femme, à peine âgée de 21 ans, arrive non sans mal à interpeller l’Empereur, se présente, et lui parle dans un français irréprochable de la reconnaissance de tout un peuple envers son libérateur. Emu non pas par cette déclaration mais par la beauté de la jeune Polonaise, Napoléon lui offre un bouquet de roses qui se trouve accroché à sa portière et ordonne ensuite au cocher de reprendre la route.
A Varsovie, l’Empereur, encore sous le charme de la rencontre de Blonie, écrit le 2 janvier à cette femme. En voici quelques lignes :
« Je n’ai vu que vous, je n’ai admiré que vous, je ne désire que vous. »
- Une réponse bien prompte est attendue pour calmer l’impatiente ardeur de Napoléon. -
N’ayant pas reçu de réponse écrite, il fait demander la belle inconnue aux réceptions organisées en son honneur.
Poniatowski remarque immédiatement l’attirance que portait Napoléon à cette femme ou plutôt à la comtesse Walewska, mariée au comte Athanase Walewski par la mère de Marie quelques années plutôt. Marie avait 18 ans ; il en avait 68. Il possède une fortune des plus colossales et appartient à la plus haute aristocratie polonaise. Dans ces temps difficiles cela aide. Le 14 juin 1805, elle donne à son vieil époux un fils, Antoine.
Ce qui ne gêne en rien les affaires de la Pologne : bien des responsables du Duché aimeraient voir une certaine idylle entre Marie et Napoléon. Cela favoriserait au passage les inclinations de l’Empereur pour une rapide reconstitution de l’unité polonaise, mais c’est sans compter sur la pudeur et la réserve de la jeune et belle polonaise.
Napoléon lui-même en devient agacé, l’invitant à déjeuner elle et son mari à plusieurs reprises, lui envoyant encore des billets sans équivoque. Mais la comtesse ne cède pas aux avances…
Devant sa froideur et son refus répété, il informe Poniatowski de son mécontentement et l’affaire Marie Walewska devient une affaire d’état. Tous, les ministres, sa famille, ses amis et même son mari exercent une pression constante. Marie, humiliée d’être traitée comme une marchandise, refuse ce que tous exigent d’elle.
Le gouvernement polonais trouve alors un stratagème : la nommer ambassadrice extraordinaire du peuple polonais. Elle prend la mesure et la gravité de son rôle et accepte en tant qu’envoyée de son gouvernement de rencontrer l’Empereur.
Cette jeune et belle ambassadrice multiplie les rencontres dans l’unique but de servir son pays et son peuple.
BELLE ET FERVENTE AMBASSADRICE
La naïveté et le désintéressement avec lesquels elle défend sa cause plait beaucoup à Napoléon. Au fil des rencontres, notre belle comtesse qui n’a connu que les caresses de son vieux mari se laisse séduire et finit par succomber aux étreintes passionnées de l' Empereur. Douce, sensible, sincère et en plus soumise, il tombe sous le charme de cette polonaise.
Toutefois, seul l’amour de sa patrie inspire la belle comtesse et en toutes circonstances elle reste la fervente ambassadrice de son pays face au maître de l’Europe qui, lui, se laisse attendrir.
Napoléon, habitué à l’élégance et à la grande débauche de Joséphine, finit par lui reprocher son manque certain de coquetterie : ses toilettes sont simples et monochromes et lorsqu’il lui en fait la remarque, elle lui rétorque :
- Une Polonaise se doit de porter le deuil de sa patrie. Quand vous la ressusciterez, sire, je ne quitterai plus le rose…
LIAISON AMOUREUSE
Durant les trois semaines passées ensemble, les relations entre les deux amants changent. Marie s’est laissée émouvoir par le cœur du grand homme, elle éprouve enfin un amour certain qu’elle ne cache plus. Lui est ravi et conquis, il commence même à l’appeler « son épouse ». Fini le temps des rendez-vous discrets et hâtifs.
Le 29 janvier, Napoléon quitte Varsovie pour livrer bataille à Eylau. Vers le mois de février, « l’ange polonais » demande à rejoindre son nouvel amour à Finkenstein en Prusse. Il la reçoit et ils vont passer ensemble trois mois. Trois mois idylliques, trois mois d’une intimité sans égale pendant lesquels l’Empereur, devant tant de générosité et d’abnégation partage avec elle des conversations d’ordre politique. Elle est très certainement la seule femme avec qui Napoléon a accepté de le faire. Dans les rencontres amoureuses, Marie n’oublie pas sa Pologne et assure son rôle d’ambassadrice en lui demandant de promettre de ne pas oublier sa chère patrie.
Napoléon a rarement été aussi heureux que durant ces trois mois. Ils sont toujours ensemble. Ainsi, le couple prend son repas seul, leur conversation toujours aimable ; vive et empressée de la part de Napoléon ; tendre, passionnée et mélancolique de la part de Marie.
Un fait rare : elle a même son appartement qui communique avec le sien. Elle ne quitte plus le quartier général, laissant à Varsovie son époux, blessé dans son honneur et dans ses affections.
La guerre revient au galop, les amants se séparent, Marie Walewska n’aura plus jamais l’occasion de côtoyer l’Empereur aussi longtemps et aussi librement que durant ces quelques mois passés.
Le 14 juin la Grande Armée écrase les Russes à Friedland et le 22 juillet, conformément à la promesse faite à sa maîtresse, il crée le Duché de Varsovie. Au lendemain de Wagram, en 1809, Marie habillée de rose séjourne à Schönbrunn auprès de lui et ne tarde pas à lui annoncer un événement heureux.
Napoléon est fou de joie devant la preuve indéniable qu’il peut procréer. Cela marque la fin du règne de Joséphine. L’idée d’épouser sa belle comtesse lui traverse l’esprit mais, vite rattrapé par la raison d’état, il épousera l’Autrichienne Marie Louise en 1810. Avant de quitter cette demeure, pressentant que rien ne serait plus comme avant, Marie remet à Napoléon une bague avec une boucle de ses cheveux et une inscription :
- Quand tu cesseras de m’aimer, n’oublie pas que je t’aime.
Le 10 mai 1810, elle accouche, chez son époux d’un garçon Alexandre Florian Joseph Colonna Walewski, qui a l’élégance de le reconnaître. Quelques mois plus tard, elle s’installe à Paris avec son fils Alexandre.
L’Empereur le sait et leur rend des visites discrètes mais régulières. Il décide avant la campagne de Russie de faire une dote colossale à Marie et Alexandre : une somme de 170 000 Francs ainsi qu’un majorat situé dans le royaume de Naples. Il nomme Alexandre comte. Plus tard en 1814, Napoléon offre un autre majorat sur les canaux et fait acheter pour son fils un hôtel, rue de la Victoire.
RESIGNATION
En 1814, après la première abdication, Napoléon tente de se suicider pour échapper à l’exil. Elle se précipite à son chevet en maîtresse dévouée, et attend discrètement dans une pièce voisine toute une nuit et au petit matin le sachant en vie elle repart sans avoir pu le voir. Entretemps, son mari le comte Athanase meurt à Rome. La comtesse libérée est déterminée à reconquérir sa place « d’épouse polonaise » auprès de Napoléon, fait courir le bruit que Murat remet en cause le majorat de Naples constitué par l’Empereur en 1812 pour le compte de son fils Alexandre et demande la permission de se rendre sur l’île d’Elbe. Permission qui lui est accordée et elle accoste à Porto FerraIo en 1814.
Napoléon ne cache pas sa joie de retrouver son épouse polonaise. Sur cette île, il fait de longues promenades en compagnie de Marie et Alexandre ce qui ravisse à nouveau le cœur de Bonaparte,
les discussions égayent son esprit, la joie de pouvoir enfin parler à son fils qui l’appelle « papa empereur » le transporte d’allégresse.
Marie se prend à espérer qu’elle pourra enfin consacrer le reste de sa vie auprès de celui qu’elle aime.
Mais Napoléon ne pense pas à ce destin et organise son retour en France ; la présence de sa polonaise, qui fait déjà désordre sur l’île, pourrait compromettre son projet dont celui de réclamer sa femme légitime et le roi de Rome. Sa décision est prise, elle doit retourner en Italie, seulement trois jours après son arrivée ! Marie rembarque avec son fils et comprend à ce moment-là qu’elle ne sera toujours qu’une femme docile, tendre et aimante mais jamais son épouse officielle.
Et pourtant, lors de la seconde abdication, « l’ange polonais » où encore « son épouse polonaise » est parmi les derniers fidèles à voir Napoléon quitter l’Élysée pour Saint Héléne.
LA FIN DE LA BELLE
En 1816, elle épouse d’Ornano, cousin des Bonaparte et lui donne un fils en juin 1817. Mal remise de son accouchement, elle décède à Paris, 48 rue Chantereine (ancienne et future rue de la Victoire) entourée de son mari et de ses trois fils, Antoine, Alexandre et Rodolphe Auguste. Son coeur repose au cimetière du père Lachaise et son corps en Pologne
Née en 1786, elle avait trente et un an.
c'est bien d'elle qu'on peut dire que son âme est aussi belle que sa figure"
(Napoléon, à Saint Hélène, évoquant Marie Walewska)
magazine :"Napoléon1er" Marie walewska de Andrzey Nieuwazny
Atlas "Napoléon et les femmes"
Wikipédia
Marie Walewska de Octave Aubry
Les planches :
1er tableau de R.Lefèvre, musée Napoléon d'Avenberg
2ème collection félix Philippoteaux
3ème inconnu
4ème Isabey
5ème tableau de Gérard, chateau de Versaille
Et la collaboration de Patrick.Fontanel